Dans la Divine Comédie de Dante, l’Enfer comprend 34 chants, un de plus que le purgatoire ou le paradis. Le premier chant de l’enfer est un chant d’introduction à l’oeuvre entière :
Au milieu du chemin de notre vie
je me retrouvai par une forêt obscure
car la voie droite était perdue.
Ah dire ce qu’elle était est chose dure
cette forêt féroce et âpre et forte
qui ranime la peur dans la pensée!
Elle est si amère que mort l’est à peine plus;
mais pour parler du bien que j’y trouvai,
je dirai des autres choses que j’y ai vues.
….
(traduction de Jacqueline Risset)
Mon illustration comporte elle aussi 34 chants, 34 pages triangulaires. Le chant 1, en bas à droite, un peu décalé, est une présentation générale.
En 1990, j’étais, moi aussi, au milieu du chemin de ma vie … en pleine crise existentielle …
J’ai donné à l’Enfer la forme générale d’un prison, d’une forteresse.
Dante a placé son pire ennemi, le pape Boniface VIII au chant 19, là où on voit sur mon illustration les deux pieds du pape Nicolas III qui confond le passage de Dante avec l’arrivée annoncée de Boniface… Personnellement, j’ai placé mon ennemie plus profondément dans l’enfer et elle règne sur six chants (chants 21 à 26). Ce travail était aussi un moyen de me libérer !
Si on ne déplie pas entièrement l’illustration, dans une lecture page à page, le visage de mon ennemie n’apparaît pas, n’est pas reconnaissable. C’est aussi un travail sur le tout, les parties, les points de vue holistique ou réductionniste qui nous opposaient. Je cherchais dans un travail de plasticien des réponses à mes frustrations dans mon activité professionnelle …
Pour la réalisation, j’ai appliqué, pressé sur le papier des « débris de la civilisation », des filets à oranges, des blisters, toutes sortes d’objets enduits de jus de peinture à l’huile dilués à l’essence de térébenthine.
à suivre …